Lesnouvelles sont inquiétantes pour Bernard Pivot. Selon un article de France Dimanche, l’ancien présentateur de 86 ans serait hospitalisé depuis un mois, son état de santé "J'ai rencontré Alexandre Soljenitsyne quatre fois, quatre moments extraordinaires 1. Avant même de l'inviter dans Apostrophes, le 11 avril 1975, je lui avais consacré, fin 1973, au moment de la sortie de L'Archipel du Goulag, l'une des émissions d'Ouvrez les guillemets. Le débat avait été fort animé, notamment entre Jean Daniel et Max-Pol Fouchet. Le premier parlait d'un témoignage capital, tandis que le second minimisait son importance. Tout comme Alain Bosquet, également sur le plateau, qui était fort dubitatif. Car, il faut bien le rappeler aujourd'hui, il n'y avait pas alors de belle unanimité au sein de l'intelligentsia française. Nombre d'intellectuels critiquaient l'aspect partiel du récit de Soljenitsyne, d'autres encore considéraient qu'il n'était pas de grande qualité littéraire. Début 1975, alors que, expulsé d'URSS, il résidait en Suisse, je l'ai convié à l'occasion de la sortie de ses Mémoires, Le Chêne et le Veau. C'était l'une de mes premières émissions d'Apostrophes et je venais d'avoir Nabokov. Deux grands Russes coup sur coup. Quel bonheur ! C'était formidable. L'auteur d'Une journée d'Ivan Denissovitch et du Pavillon des cancéreux était vraiment impressionnant. Par sa stature, sa barbe, son physique. Tout ce qu'il représentait, la guerre, le goulag, le cancer, bref, tout ce que à quoi il avait échappé, et son courage incroyable faisaient que vous vous sentiez bête et tout petit en face de lui. C'est comme si vous aviez reçu de Gaulle ! On me disait qu'il n'avait pas bon caractère. Comment aurait-il pu survivre sinon ? Cela dit, il a fait montre, à chacune de nos rencontres, d'une vraie gentillesse et d'une grande disponibilité. Il tenait à sa femme, à ses enfants, à la Russie, à Dieu et au temps. Le temps était son bien le plus précieux, car il savait qu'il pouvait mourir d'un moment à l'autre et qu'il lui fallait finir La Roue rouge, sa monumentale histoire de la Russie d'avant 1917. Aussi, lorsque je suis allé le retrouver dans son refuge du Vermont, aux Etats-Unis, en 1983, pour un long tête-à-tête, j'avais conscience qu'il s'agissait là d'un cadeau inestimable. Une fois le principe de l'interview télévisée accepté - j'étais le seul à m'être entretenu avec lui dans le Vermont - il était tout à vous. Plus tard, je l'ai reçu, dans le cadre de Bouillon de culture ; enfin, je suis allé tourner un reportage en 1998, après son retour en Russie, dans sa maison des environs de Moscou. Chaque fois, j'ai eu le sentiment d'avoir en face de moi un témoin et un acteur capital de l'Histoire." 1 Un coffret réunissant les quatre émissions sera en vente le 1er octobre dans une coédition Gallimard-INA. Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris ValléeLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles Pialoux Néen 1935, Bernard Pivot était lui aussi originaire de Lyon. 1967 : Il apparaît pour la première fois à la télévision. 1975 : Il crée le magazine Lire du Figaro avec Jean-Louis Servan-Schreiber. 1975-1993 : Directeur de rédaction du magazine Lire. 1993-1998 : Editorialiste du magazine. 1973-1974 : Animation du magazine littéraire « Ouvrez les guillemets ». 1975 BERNARD PIVOT - Le journaliste ici en 2001 a lancé en 2009 le Comité de défense du beaujolais. REUTERS/John Schults Décembre 1989, sur le plateau d'Apostrophes. Bernard Pivot, maître des lieux, consacre son rendez-vous hebdomadaire aux plaisirs populaires. Parmi ses invités, Georges Duboeuf, déjà surnommé le "pape du beaujolais". Ce négociant, qui a bâti un empire, raconte comment la sortie des vins primeurs de sa région est devenue un événement commercial planétaire. La parole passe à Jean-Pierre Coffe, autre participant de l'émission. Le pourfendeur de la malbouffe titille le vendeur de bouteilles sur la chaptalisation, une méthode qui consiste à ajouter du sucre dans les cuves afin d'augmenter artificiellement le degré d'alcool. Ni une ni deux, l'animateur s'interpose "Georges Duboeuf dit qu'une honnête et douce chaptalisation améliore le vin." Pas touche au beaujolais ! En Bernard Pivot, le rouge le plus fêté s'est trouvé son meilleur défenseur. Lobbyiste ? Cet amoureux de la langue française préfère se définir comme l'"échanson" du beaujolais. Littéralement, "la personne qui verse à boire". Coïncidence les heures de gloire du vin canaille correspondent à celles du journaliste 1. De 1975, premier millésime d'Apostrophes, au début des années 2000, où les téléspectateurs purent déguster la dernière goutte de Bouillon de culture. Aujourd'hui, le juré de l'académie Goncourt s'est mué en avocat opiniâtre de ce vignoble victime du désamour des consommateurs. Quitte à se fâcher à table face à des récalcitrants "Dénigrer par principe ce vin, c'est comme critiquer un livre sans l'avoir lu." Illustration de son plaidoyer bachique, Pivot a lancé, en 2009, le Comité de défense du beaujolais. Une réponse au "lynchage dont [ce] vin du peuple, vin des ouvriers, vin festif, est victime alors qu'il est un symbole de l'identité française", dixit son cofondateur Périco Légasse, chroniqueur gastronomique à Marianne. Une fois par an, ses dix membres se réunissent pour distinguer de leurs papilles éclairées un beaujolais nouveau et un beaujolais-villages nouveau. De quoi, évidemment, attirer l'attention des médias sur ce vignoble en crise. "Notre initiative n'est qu'une goutte dans la cuve, convient Bernard Pivot. Offre limitée. 2 mois pour 1€ sans engagement Mais c'est une manière de dire aux vignerons de la région qu'on ne les oublie pas." Une marque de reconnaissance de sa part, aussi ne doit-il pas au vignoble du nord de Lyon - sa ville natale - ses premiers pas professionnels ? Comme il le rapporte dans son Dictionnaire amoureux du vin, c'est en promettant au rédacteur en chef... un caquillon petit tonneau de 10 litres de beaujolais qu'il a décroché, à 23 ans, un poste au Figaro littéraire ! Les parents du débutant exploitaient alors quelques arpents de vigne à Quincié-en-Beaujolais Rhône. Propriétaire d'une maison dans le Beaujolais depuis 1968, Bernard Pivot s'est toujours refusé à racheter un domaine viticole. C'est dans cette bourgade de 1 100 âmes, à l'ombre du mont Brouilly, que se trouve l'origine de l'histoire. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Pivot, commerçants lyonnais, s'y réfugient. Ils possèdent là une maison familiale. Le petit Bernard - il n'a pas 10 ans - vendange, fréquente cuvages et caveaux. Bref, s'imprègne du Beaujolais. "J'ai été élevé à son vin, il coule dans mes veines. Même si j'en ai rencontré et apprécié d'autres, bien plus illustres, par la suite", confie- t-il. Son frère Jean-Charles s'installe au village et épouse la vie de vigneron. Le journaliste, lui, achète en 1968 une jolie demeure dans laquelle il continue de se rendre régulièrement. Il est même élu sans étiquette adjoint au maire de la commune pendant un mandat, de 1977 à 1983. Et la bibliothèque du bourg - qui porte son nom - renferme plus de 12 000 livres offerts par le critique littéraire. Avec, souvent, dans la marge, ses précieuses annotations. "Comment parler littérature et aimer ce petit vin ?"A Paris, son image d'homme de télévision se colore de beaujolais. "Des intellectuels me l'ont reproché quand, dans les années 1980, Apostrophes est devenu incontournable. Comment pouvais-je parler littérature et aimer ce petit vin ?" se souvient-il. L'amateur de moulin-à-vent et de côte-de-brouilly en a pris son parti "Cette réputation a contribué à me rapprocher des téléspectateurs. Je passais pour quelqu'un qui ne se la pétait pas !" Pour défendre la cause beaujolaise, il a plaidé jusque... devant la justice. En 2006, la société de Georges Duboeuf est poursuivie pour "tromperie et tentative de tromperie". Une affaire de mélange de raisins de différentes appellations. Sans hésiter, Bernard Pivot se porte - "en ami" - témoin de moralité. "Il est impossible qu'il soit un tricheur", déclare-t-il à la barre du tribunal de Ville-franche-sur-Saône. Peine perdue. L'entreprise est condamnée, bien que la responsabilité de la supercherie se porte sur un collaborateur et non sur le dirigeant. Georges Duboeuf voue une grande estime - réciproque - à l'ancien journaliste. "C'est un très bon dégustateur, gourmand et gourmet. Son influence pour le beaujolais est importante", juge le patron. Par l'entremise de ce dernier, Bernard Pivot a fait partie des rares chanceux à bénéficier, pendant quelques millésimes, des bouteilles de feu Henri Jayer, vigneron bourguignon de légende. Du Bernard Pivot sur les étals chinoisEnfin ! s'est-on exclamé dans le vignoble. Bernard Pivot a cédé depuis l'an dernier, une cuvée de beaujolais-villages porte son nom. "Jusqu'à présent, je trouvais cela incompatible avec mon métier d'animateur d'une chaîne du service public. Mais, aujourd'hui, je suis retraité", se justifie-t-il. Philippe Lacondemine, ancien président de la cave coopérative de Quincié - à laquelle le journaliste apporte les raisins des quelques ceps qui entourent sa maison -, l'a convaincu une veille de Noël. "Je lui ai dit que ce vin devait être accessible, comme lui l'avait été avec les téléspectateurs", raconte ce vigneron. Résultat, de 50 000 à 60 000 bouteilles par millésime, vendues environ 6 euros l'unité dans une enseigne de la grande distribution. Le contenu est sélectionné par un jury d'émérites dégustateurs - où l'on retrouve Périco Légasse ou encore... Georges Duboeuf. "Un vin sérieux, mais gai et populaire, à l'image de celui dont il porte le patronyme", selon les mots du restaurateur Pierre Troisgros, membre de l'équipe. Des négociations sont même en cours pour l'exporter dans... l'empire du Milieu, où le Dictionnaire amoureux du vin vient d'être traduit en mandarin. Sa commission ? 24 bouteilles. Rien de plus. "Pas un centime ! Si j'ai accepté qu'on utilise mon nom, c'est pour aider le beaujolais", insiste Bernard Pivot. C'est son obsession ne pas être accusé de gagner de l'argent sur les fruits de la vigne. Pour cette raison - "et parce que ce n'est pas [son] métier" -, il s'est toujours refusé à racheter un domaine viticole. "Combien de fois me l'a-t-on suggéré", soupire-t-il. Mais lui, combien a-t-il rapporté au Beaujolais ? Difficile de quantifier les effets de sa notoriété en nombre de bouteilles vendues... "La profession, en tout cas, ne l'a pas assez sollicité quand il était au sommet de sa gloire", regrette un vigneron. "Les retombées économiques de prescripteurs comme lui sont considérables", ajoute néanmoins Frédéric Laveur, président de l'organisme de gestion et de défense des appellations génériques du vignoble. Depuis deux ans, Bernard Pivot a d'ailleurs été rejoint par un autre avocat de renom, qui élabore pour Leader Price sa cuvée de beaujolais nouveau. Un certain... Jean-Pierre Coffe. 1 Ancien membre du conseil de surveillance du groupe Express-Expansion. Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris ValléeLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles Pialoux
Ildevait remonter sur scène pour une trentaine de représentations de son spectacle "Au secours, les mots m'ont mangé !" jusqu'à fin 2018, mais il n'en sera rien. Pour des raisons de santé, Bernard Pivot est contraint de tout annuler. "J'ai un gros coup de fatigue, et mon médecin m'a dit que c'était compliqué pour moi de rester seul une heure et quart sur scène.
J'aime comment Falardeau semble gêner, au final, d'entendre son texte lu par quelqu'un d'autre, accompagné d'é quelqu'un de très humble, au final.
BernardPivot, c’était évidemment les sept cent vingt-quatre émissions "Apostrophes" sur Antenne 2 du 10 janvier 1975 au 22 juin 1990 puis les quatre cent sept émissions "Bouillon de culture
Nicolas Carreau, édité par Europe 1 21h27, le 03 décembre 2019Bernard Pivot a pris mardi sa retraite de la présidence de l'Académie Goncourt. Le journaliste a expliqué sur Europe 1 vouloir laisser "sa place à quelqu'un de beaucoup plus jeune". INTERVIEWBernard Pivot prend une retraite bien méritée. Le célèbre journaliste a quitté mardi la prestigieuse Académie Goncourt, dont il était le président depuis cinq ans. "Je laisse la place à quelqu'un de beaucoup plus jeune que moi, je l'espère il a 84 ans, ndlr. Par une sorte d'égoïsme bien naturel quand on prend de l'âge, je veux retrouver le plein usage de mon temps, notamment l'été quand il faut lire et lire encore, au lieu de profiter de sa famille, des vacances et de la mer", a-t-il expliqué sur Europe Pivot, qui a accédé à la notoriété grâce à l'émission littéraire "Apostrophes", est entré en 2004 à l'Académie Goncourt. Il a été le premier non-écrivain à rejoindre la prestigieuse institution. "Le plus grand moment pour moi était mon élection. C'était inespéré, puisque seuls les écrivains entrent à l'Académie Goncourt, j'étais journaliste", se rappelle-t-il. Sur Twitter, l'Académie Goncourt a mis en ligne une photo des académiciens fêtant le départ de leur président, qui leur avait fait part cet été de son souhait de se retirer. Les festivités se sont déroulées chez Drouant, le restaurant dans le centre de Paris où est chaque année annoncé le lauréat du plus prestigieux prix littéraire du monde francophone.
Etenfin pour clôturer cet exposé, nous étudierons les multiples facettes d’ « Apostrophes » et de son présentateur. I/ Bernard PIVOT avant Apostrophes. Bernard pivot est né le 5 mai 1935 à Lyon. Durant ces jeunes années son père est fait prisonnier de guerre et sa mère décide de partir à Quincié en Beaujolais.
Une vie dédiée à la culture et à la littérature. L'ancien présentateur d'Apostrophes» et de Bouillon de culture» a aujourd'hui du temps pour lui. Il revient sur les petits bonheurs du temps qui passe avec un nouveau livre …mais la vie continue », paru aux éditions Albin Michel. Bernard Pivot aura 86 ans aux fraises, et il ne les sucre toujours pas ! C’est pourtant de la vieillesse dont cette figure légendaire de la télévision a choisi de parler dans le roman qu’il vient de publier, lui qui en a tant parlé, de romans, pendant sa carrière de journaliste. Du Figaro à France Télévisions en passant par la radio, ce Lyonnais d’origine a toujours été un homme de passions. Pour le vin, le foot, le cinéma, et bien évidemment le livre, la lecture, et cette langue française qu’il chérit et défend, à l’Académie Goncourt et aujourd’hui dans ce roman qui vient de sortir aux éditions Albin Michel. Le livre s’intitule …mais la vie continue ». Bernard Pivot est avec découvrir également, pendant l'émission, un portrait de Bernard Pivot par Amélie Beaucour.
Nouvelletranscription d'une interview de Danilo Kiš (1935-1989) menée cette fois-ci par Bernard Pivot (né en 1935) (après celle de Jacques Chancel transcrite ici).. On a qualifié les interviews de Bernard Pivot de très enthousiastes et très lucratives. Enthousiaste, il l'était pour stimuler ses invités. Lucratives, elles semblaient l'être étant donné l'impact qu'elles avaient sur Chez lui à Paris le 13 janvier. © Patrick Fouque / Paris Match 24/01/2021 à 0535, Mis à jour le 23/01/2021 à 1838 Le journaliste et homme de lettres s’attaque sans complexe aux vertiges de l’âge dans son nouveau roman, ... mais la vie continue ». Vieillir est un métier à temps complet. On s’observe, on s’ausculte, on s’inquiète. Certains noms propres se retirent de la mémoire sur la pointe des pieds. Wikipédia est là désormais mais certains se refusent à y aller trop vite. Surtout ne pas encourager la paresse des neurones ! Avoir des rides au front n’oblige pas à en avoir au cerveau. Evidemment, il y a Alzheimer. Cette horreur joue auprès des personnes âgées le rôle de l’ogre auprès des enfants. On lui livre des combats en ligne à l’aide des mots croisés ou du Sudoku. Ou bien, comme Bernard Pivot, on se requinque avec la lecture, cette bonne vieille aussi Bernard Pivot "Goncourt, mon amour" La suite après cette publicité Autrefois, c’était presque une marâtre. Pour Apostrophes », il fallait engloutir des centaines de pages par semaine. A la présidence du Goncourt, l’été tournait à l’épreuve de force. Aujourd’hui, c’est une nymphe. Il n’a plus que sa chronique du Journal du dimanche ». C’est d’ailleurs un paradoxe qui le laisse rêveur quand on est jeune et qu’on a la vie devant soi, on est toujours pressé ; devenus vieux, quand l’avenir nous est mesuré, on prend tout son temps. Bizarre. Mais pas désagréable on savoure vite la lenteur. Si les autres s’agitent, grand bien leur fasse. La suite après cette publicité Lire aussi Bernard Pivot bouillonne de questions Comme disait Balzac, les vieillards sont des gens qui ont dîné et regardent les autres manger. Inutile de s’énerver. Pivot, par exemple, était né impatient. Ça lui est passé. Plus question pour lui de s’échauffer à tort et à travers. Il faut se tenir soi-même à l’œil. Avec le grand âge, les qualités se bonifient, tout comme les défauts s’aggravent. Très bonne raison pour ne pas se laisser aller. La suite après cette publicité La suite après cette publicité Vous ne ferez pas dire à Pivot que c’était mieux avant. D’abord parce qu’il trouve l’affirmation idiote ; ensuite parce qu’elle trahit trop vite son vieux con ». Cela dit, la politesse ancienne lui manque. Et, contrairement à l’époque, il ne hisse pas la dérision au rang de vertu hygiénique. Il se demande même si, autrefois, on n’avait pas plus de considération pour les vieux. Peut-être aussi parce qu’il y en avait moins. Promis il va y réfléchir. Mais plus tard. Pour l’instant, il sort un nouveau livre. Son sujet le quatrième âge. Je vous rassure rien du ronchon professionnel qui répand son venin. Rien non plus du papy philosophe qui prend tout avec Jurus, son personnage, 82 ans, a beau se tasser, avoir du mal à lacer ses chaussures, pester contre son ordinateur et trouver qu’il a parfois la tête aussi lourde que les jambes, il reste un parfait sosie de Pivot le bon vivant qui prend tout avec ironie mais ne se cache pas derrière son petit doigt. S’il faut appuyer là où ça fait mal, il va le faire. Et pas de pudibonderie, non plus. La littérature a souvent des pudeurs de petite cuillère dès qu’elle aborde la sexualité des gens âgés. Rien de tel. Ce Jurus a l’œil et le bon. Il voit tout des huit copains et copines dont il parle dans son livre. Et il dit tout. Ça fait beaucoup de bien. Une vraie bourrasque de fraîcheur et d’ironie dans une année plombée par l’atmosphère d’Ehpad qui s’est abattue sur l’ est allé interroger l’auteur. Lui a 85 ans. Et, avec ça, toujours la bougeotte. C’était ma quatrième interview avec lui en vingt ans. Eh bien, c’était à une quatrième adresse. Il ne change pas. Comment fait-il ? Réponse en 220 pages. J’écris pour garder l’esprit vif, joyeux et curieux Paris Match. A quel âge êtes-vous devenu vieux ? Bernard Pivot. Le jour de mes 80 ans. Je me suis dit que j’entrais dans le grand âge. Avant, je n’y avais jamais pensé. Là, j’ai songé que ma vie aurait une fin. Un drôle d’effet. Mes 80 premières années étaient passées comme une lettre à la poste. Je me suis dit “chapeau !” Mais des amis sont partis. Certains avaient mon âge. Je me consolais en me disant que chaque année a son quota de départs et que le leur me laissait un répit. Mais que tout cela passe vite. J’en suis à 85. Et, croyez-moi, 85 ce n’est pas 82. C’est comme entre 7 ans et 10 ans. Chez les vieux, c’est comme chez les tout jeunes. Les petites différences deviennent énormes. "J’évite de râler pour ne pas avoir l’air bougon" Est-il dur d’être un vieux monsieur ? On sent son âge. Tout vous inquiète. Parfois le corps en a marre. Votre moi médical s’empare du moindre pépin. C’est pourquoi j’écris. Pour garder l’esprit vif, joyeux et curieux. Diriez-vous qu’il n’a jamais été aussi facile d’être vieux ou que ça n’a jamais été aussi frustrant ? Les deux, bien sûr. Molière est mort à 51 ans, épuisé. Aujourd’hui, c’est la force de l’âge. Ça allonge l’espoir. Le jeunisme, en revanche, peut être blessant. C’est le nouvel apartheid. Dès qu’on parle de vous dans un journal, on donne votre âge. On ne signale ni vos qualités, ni vos défauts, on commence par votre fiche d’état civil."Les tweets peuvent être un enfer. Et un enfer dangereux. " Est-ce que ce sont vos qualités qui s’épanouissent ou vos défauts qui s’aggravent ? Mon grand défaut était l’impatience. Je la maîtrise beaucoup mieux. Mais, surtout, j’évite de râler pour ne pas avoir l’air bougon. Il faut n’avoir pas connu les années 1940 pour croire que c’était mieux avant. On passe vite pour un vieux con. Et les jeunes filent à tired’aile. A juste titre. Vous n’avez pas de nostalgies ? Si, naturellement. Certaines pâtisseries, par exemple, comme les “conversations”, un gâteau qui a disparu. Et, plus sérieusement, une forme de rapports entre les hommes et les femmes. Aujourd’hui, la galanterie est presque une prise de risque. On est vite soupçonné de mépris ou d’agression sexiste. Mais, d’un autre côté, que d’avantages ! L’ordinateur simplifie tellement la vie. Je me rappelle, dans les années 1950, quand je retrouvais Bouvard à minuit au marbre du journal pour dicter nos papiers directement aux linotypistes. Et puis quels plaisirs dans la presse ! Les patrons ne sont plus par-dessus votre épaule. On est plus libre de ses mouvements, de son temps, de ses jugements. En revanche, les tweets peuvent être un enfer. Et un enfer dangereux. Pour moi, quand on est journaliste, on ne balance pas n’importe quoi."En me cachant derrière les neuf personnages du livre, j’aborde des thèmes délicats que je n’aurais pas traités si j’avais parlé de moi" Etes-vous devenu une personne fragile ? J’ai toujours été prudent. Quand je jouais au foot, en milieu de terrain, à l’époque on disait qu’on jouait inter », je me rangeais des voitures quand j’affrontais les grosses brutes qui cassent du bois. Donc je le suis resté. Le confinement ne m’a ni gêné ni vexé. De toute façon, j’ai vécu confiné des dizaines d’années. Je lisais du matin au soir. C’était ma vie. Pourquoi avoir écrit un roman plutôt qu’un essai allègre sur le grand âge ? Disons que c’est une chronique romanesque. Sans doute ai-je choisi cette formule par pudeur. Je ne voulais pas parler de ma santé. En me cachant derrière les neuf personnages du livre, j’aborde des thèmes délicats que je n’aurais pas traités si j’avais parlé de moi. La sexualité, par exemple, est un vrai tabou en littérature. Je n’ai pas de souvenirs de bons livres sur ce thème. Peut-être un ouvrage japonais sur un vieux couple. Me cacher derrière les copains de ce livre était très amusant. Un dédoublement excitant pour l’esprit."Ce qui fait peur, c’est la vraie solitude. Celle qu’on ne partage avec personne." Avez-vous peur d’entrer un jour dans un Ehpad ? J’espère y échapper. Je suis dans une situation privilégiée car j’ai deux filles que j’aime et qui m’aiment. Tant mieux car je dois dire qu’au printemps dernier le spectacle des caravanes de cercueils sortant de ces établissements était saisissant et affreux. Parfois, en plein sommeil, j’y songe. Mes personnages, eux, se félicitent de n’y être pas. Ce qui fait peur, c’est la vraie solitude. Celle qu’on ne partage avec personne. Et puis le délabrement, le Trafalgar personnel. Comment imaginez-vous votre mort idéale ? Assis dans mon canapé, et tout s’arrête. Ou bien, en train de relire un de mes auteurs préférés, un Colette, un Voltaire, un Baudelaire ou un Giono. Avec, en fond sonore, un concerto de Mozart. Si vous rencontrez Dieu, qu’espérez-vous qu’il vous dise ? “Ah, tiens, c’est vous Pivot. Je vous attendais depuis longtemps. Pourriez-vous m’expliquer enfin la règle des participes passés des verbes pronominaux ?” Comme je n’en serai pas capable, peut-être me renverra-t-il enquêter sur le sujet. © Mais la vie continue », de Bernard Pivot, éd. Albin Michel, 224 pages, 19,90 euros. Désormais il va pouvoir lire et relire des livres pour le plaisir mais il ne changera pas ses habitudes de lecture pour autant. Car Bernard Pivot ne lit "jamais allongé, ni
Culture Réservé aux abonnés À l'heure où Bernard Pivot publie un livre sur l'amitié et quitte sa chronique du JDD », Pierre Boncenne rappelle le mépris social dont il fut l'objet. Bernard Pivot pose pour les photographes le 29 juin 2001 sur le plateau de la dernière édition de son émission Bouillon de culture ». © PIERRE-FRANCK COLOMBIER / AFP Il n'est pas de la paroisse » cette expression concise m'a toujours semblé la meilleure manière de répondre aux interrogations sur la place singulière occupée par Bernard Pivot dans la vie des livres. Peu importe ici notre connivence, la manière dont nous avons cheminé ensemble Lire, Apostrophes, Bouillon de culture et, au-delà, partagé tant de moments d'amitié cette affinité réciproque dont il parle si bien dans son dernier livre, Amis, chers amis. À partir de mon poste d'observation, je veux juste rappeler un état de fait le plus souvent oublié aujourd'hui, enfoui dans les dégâts provoqués par les furieuses diatribes à l'encontre du spectacle audiovisuel, coupable, comme chacun sait, d'assassinat de la littérature et de la toute une période, Bernard Pivot... Je m'abonne Tous les contenus du Point en illimité Vous lisez actuellement Quand Bernard Pivot était le coupable idéal 20 Commentaires Commenter Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point. Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.
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